Toubi or not Toubi ?

« Le vrai est le même que le fait* »
G.Vico

Le fonctionnement du monde virtuel Second Life et les répercussions qu’il a sur notre propre monde « objectif » sont l’occasion de confirmer un phénomène que beaucoup voudraient ignorer : la réalité n’existe pas ou plutôt ce que nous appelons la réalité n’est que le produit de l’activité de notre esprit. Si cette affirmation peut paraître provocante au regard du bon sens dans lequel nous baignons, elle n’en fut pas moins découverte dans l’antiquité et formalisée dans la fameuse allégorie platonicienne de la caverne. Epictète, quant à lui déclarait que ce qui blesse les hommes n’est pas la réalité, mais la représentation qu’ils s’en font, affirmant par là que toute chose existe pour le sujet en fonction de ce que son esprit en fait… D’ailleurs pour déclarer qu’une chose existe, il faut bien quelqu’un pour le constater. Vieux débat d’actualité dès lors, qui ne cesse de diviser les matérialistes et les constructivistes radicaux.

Mais revenons à nos moutons et à nos mondes virtuels. Le « jeu » Second Life, lancé en 2003 offre la possibilité à ses abonnés, de mener une vie parallèle dans un univers en 3D. Il s’agit en quelque sorte d’une simulation de la vie humaine. Elle est peuplée d’avatars déambulant dans des rues fictives, d’échoppes tout aussi incorporelles et d’objets non moins imaginés à grand renfort de technologie. Depuis environ 2 ans, les frontières de cet univers que personne n’osera qualifier de réel, sont devenues poreuses. Les entreprises s’y sont développées, une monnaie et un marché monétaire y est apparu. En un mot si les joueurs ont colonisé Second life, second Life a débordé de l’écran de nos PC.

Quelques exemples de cette transposition bilatérale : La monnaie de singe qui a cours sur SL s’appelle le Linden-Dollar, elle peut désormais s’échanger contre des espèces sonnantes et trébuchantes. Des candidats à l’élection présidentielle, à savoir Jean-Marie Lepen et Ségolène Royal ont ouvert des bureaux de campagnes virtuels. American Apparel fut la 1ère marque présente, bientôt suivie par – AMD – IBM – Dell – Toyota – BBC – Reuters – Starwood – A&B Perfumes – Nissan – Adidas – Sun Microsystems – Warner – Pontiac – ABC – Vodafone – Major League Baseball – Microsoft – Coolz – Crayon – Cent – Nike – Budweiser – Lego – Reebok - L’Oréal Paris. Ces entreprises soit vendent des produits réels, soit se servent de SL comme d’un outil de test marketing. La société « Repères » est un institut d’études Marketing qui offre ses services pour implémenter le processus. Il est donc tout à fait normal que la publicité ait cours sur Second Life. Et qui dit pub, dit agences de pub auxquelles ont peut avoir recours pour de l’affichage, de l’événementiel, du guerilla marketing, etc.

La réalité est donc le produit de l’expérience, des croyances et des pratiques. N’en concluez pourtant pas que pour voler, il suffise de se croire oiseau et de battre des ailes. La gravité, même si elle fut découverte par Newton, n’en reste pas moins une loi à laquelle tout corps est soumis. Il en va tout autrement de la consommation, du désir et des produits humains, raison pour laquelle la publicité existe, somme toute. La publicité crée une réalité, fait constater et exister un objet, pour le meilleur, et parfois pour le pire.

Au boulot on se tâte encore, peut-être que l’on va passer en mode virtuel et laisser nos avatars travailler à notre place. Je pense que l’on tient une idée là, non ?

*de facere « faire »

Originally posted in the BGblog

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